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Économie scientifique
20 décembre 2019

036 - Les multinationales pharmaceutiques (partie 5 : Une corruption multiforme).

Poursuivons nos extraits de l’ouvrage de Peter C. Gotzsche avec :

1) le sujet des périodiques médicaux (qui sont des revues de publications de recherches scientifiques spécialisées dans le domaine de la médecine) ; [1]

2) le sujet de la manipulation (études de familiarisation) et de la surveillance des médecins. [2]

 

1)

036-AL’ancien rédacteur en chef du BMJ [British Medical Journal], Richard Smith, a écrit un article… intitulé « Les périodiques médicaux sont une extension de la division marketing des compagnies pharmaceutiques. »

[…]

… Le rédacteur en chef du Lancet, Richard Horton, est aussi cinglant que Richard Smith, et il a déclaré que « les périodiques ont dégénéré au point de devenir des opérations de blanchiment pour l’industrie pharmaceutique ». Il a aussi décrit comment les compagnies pharmaceutiques proposent parfois aux périodiques d’acheter une grande quantité de tirés-à-part et peuvent menacer de retirer un article si la critique des pairs est trop coriace. Les revenus de tirés-à-part comptent pour beaucoup dans le cas des principaux périodiques…

[…]

Sandoz a offert un poste de consultant rémunéré à 30 000 dollars par année à un chercheur pour le convaincre d’accepter une conclusion favorable dans un essai, en dépit du fait que le médicament pour l’hypertension de la compagnie, l’isradipine, un inhibiteur des canaux calciques, avait un taux de complications plus élevé que le médicament de comparaison.

2)

Les études de familiarisation n’ont généralement aucune valeur scientifique et ne disposent pas la plupart du temps d’un groupe de contrôle. On donne aux médecins une portion du nouveau médicament d’une compagnie en leur demandant de l’essayer sur leurs patients et de noter comment ça se passe. Les données assemblées sont plutôt inutiles et rarement publiées. Le véritable rôle des études de familiarisation consiste à leurrer autant de médecins que possible en les incitant à utiliser le nouveau médicament. Les médecins reçoivent des honoraires pour chaque patient, et bien que les compagnies parlent de recherche, cela s’apparente plutôt à des pots-de-vin.

Selon un sondage allemand, deux tiers de ces soi-disant « études » n’avaient même pas de plan ni d’objectif précis et il n’était question de publication que dans 19 % des cas. Les médicaments dont il était fait la promotion dans les études de familiarisation étaient 10 fois plus dispendieux, en moyenne, que les médicaments couramment utilisés…

036-B

Peu de médecins inscriraient sciemment leurs patients dans une étude qui les mettraient à risque dans le seul but de fournir à une compagnie un avantage commercial, et peu de patients accepteraient de participer. Les études de familiarisation ne sont donc possibles que parce que la compagnie ne révèle à personne leur véritable objectif…

Une des caractéristiques des études de familiarisation est leur recours à un très grand nombre de médecins qui traitent chacun un petit nombre de patients. La loi varie en fonction des pays, mais il est rare que les études de familiarisation nécessitent l’approbation d’un comité d’éthique indépendant ou d’un organisme de régulation des médicaments vu qu’on ne considère pas cela comme de la recherche, mais bien comme l’utilisation ordinaire d’un médicament déjà approuvé. L’ironie est totale, puisqu’au même moment, nombre de médecins sont persuadés de contribuer à la recherche. À la différence des essais cliniques ordinaires, les études de familiarisation sont habituellement supervisées par des experts en marketing et des représentants qui tentent d’influencer les pratiques prescriptives des médecins tout en collectant des données dans leurs cabinets.

[…]

[Aux États-Unis] Les compagnies pharmaceutiques reçoivent des rapports retraçant les prescriptions hebdomadaires des médecins, ce qui leur permet d’établir le rendement d’un médecin-vendeur. Les pharmacies ne révèlent habituellement pas le nom des médecins aux sociétés qui colligent cette information mais en fournissent les numéros auprès de l’Agence de médicament ; cette dernière gagne des millions en permettant aux compagnies d’apparier ses dossiers des médecins avec leur numéro.

[1] Remèdes mortels et crime organisé – Comment l’industrie pharmaceutique a corrompu les services de santé ; Peter C. Gotzsche, traduction de Fernand Turcotte, 2015 ; Presses de l’université Laval ; pp. 90-91 et 102.

[2] Remèdes mortels et crime organisé – Comment l’industrie pharmaceutique a corrompu les services de santé ; Peter C. Gotzsche, traduction de Fernand Turcotte, 2015 ; Presses de l’université Laval ; pp. 108-109 et 117.

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