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Économie scientifique
28 mai 2020

047 - Les tribunaux d’arbitrage internationaux.

La notion de cour de justice internationale en tant que méthode de règlement pacifique de différends entre États remonte à l’Antiquité.

C’est toutefois avec le traité de Jay de 1794 entre les États-Unis et la Grande-Bretagne que débute l’histoire de l’arbitrage international moderne.

Au cours du XIXe siècle, cette pratique s’est étendue à d’autres États d’Europe et d’Amérique.

Après les conférences de paix de 1899, puis de 1907, auxquelles participèrent de nombreux États, à La Haye, une Cour permanente d’arbitrage (CPA) y fut installée en 1913.

Après la Première Guerre mondiale et la création de la Société des Nations fut mise en place, sous l’égide de cette dernière, la Cour permanente de Justice internationale (CPJI) dont le siège resta à La Haye.

Après la Seconde Guerre mondiale la Société des Nations devint l’Organisation des Nations unies (ONU) et la CPJI devint La Cour internationale de Justice (CIJ), toujours sise à La Haye. [1]

Les relations interétatiques se sont grandement développées tout au long du XIXe siècle ce qui s'est accompagné du développement des règles d'un droit international. Ce sujet d'une approche juridique internationalement reconnue pour traiter de manière juridique les différends entre États constitue ce qui est appelé aujourd'hui le droit international public. Les sources de ce droit sont essentiellement les traités et les conventions internationales. [2]

Le droit international contemporain comporte une autre volet : le droit international privé.

C'est dès le IIe siècle avant J.-C., dans l'Empire Romain, que l'étranger a graduellement acquit le droit d'obtenir justice en application des lois romaines. De tous temps, les lois du droit privé ont différé entre les États. Mais ce n'est qu'il y a peu, dans la seconde moitié du XXe siècle, poussé par la mondialisation galopante de l'économie, que s'est développé le principe de traiter les différences de droit privé entre États de manière juridique : par le droit privé international.

Le droit international privé a vocation à s'appliquer dans les relations entre des personnes de nationalités différentes et pour des situations dans lesquelles les lois de leurs pays respectifs sont en conflit.

Le droit international privé a donc pour objectif de déterminer :

    • la juridiction compétente pour trancher un litige ;

    • la loi applicable pour trancher le litige. [3]

047-B

Cependant, les différends internationaux ne se règlent pas toujours par une procédure judiciaire conventionnelle aboutissant à un jugement prononcé par des juges. Le différend peut se régler par un accord négocié entre les partis dans le cadre d'une procédure d'arbitrage. Ces arbitrages sont amenés à régler des confits dont les parties peuvent aussi bien être des États que des personnes privées ou bien des organisations intergouvernementales. Ainsi la CPA de La Haye évoquée ci-avant se situe à la croisée du droit international public et du droit international privé. Après avoir connu une activité intense immédiatement après sa création, la CPA est tombée en sommeil après la Seconde Guerre mondiale avant de connaître un nouvel essor à partir des années 1990. [4] Toutefois les affaires traitées par la CPA furent largement méconnue du grand public du fait du caractère confidentiel qui entoure des procès qui se tiennent à huis clos. Ceci jusqu'à fin 2016 où la vague de protestations déclenchée en Europe par les négociations des projets d'accords internationaux de libre échange TAFTA (Transatlantic Free Trade Aera ; Traité de libre-échange transatlantique) et CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement ; Accord économique et commercial global) révèlent l'existence de la CPA et des arbitrages qui permettraient à des multinationales de poursuivre des États en justice. Ainsi, par exemple, Philip Morris a tenté d'utiliser l'arbitrage afin d'attaquer l'Uruguay qui voulait promulguer de nouvelles lois anti-tabac ; une entreprise française a attaqué l'Egypte car cette dernière avait augmenté son salaire minimum. Les tribunaux d'arbitrage ont le pouvoir de condamner des États à des dédommagements faramineux (qui peuvent se chiffrer en dizaines de milliards de dollars).,

047-A

Certes si, par exemple, un État accorde une concession minière puis l'annule une dizaine d'années plus tard, comme le fit la Colombie, il est recevable qu'une entreprise ayant déjà grandement investi dans un projet (telle que l'entreprise canadienne Cosigo), puisse demander en justice des dédommagements si un accord négocié ne peut être trouvé. Le tribunal d'arbitrage est censé défendre des investisseurs étrangers contre d'éventuels abus d'un État qui leur porteraient préjudice. Soit ! Mais un important problème est que les arbitres internationaux de la CPA ne sont pas des juges, mais des avocats d'affaires qui sont à tour de rôle arbitre principal, défenseur d'un État ou défenseur d'une entreprise. Comme dans bien d'autres domaines, mais ici dans un plus grand secret, ces arbitres sont très souvent corrompus par de grasses rémunérations provenant de l'élite financière des holdings qui constituent une large part des actionnaires des multinationales. Ces arbitres sont donc généralement enclins à privilégier l'intérêt des investisseurs par rapport à celui des populations concernées. [5]

Les traités de libre-échange TAFTA, entre l'Europe et les États-Unis, et CETA, entre l'Europe et le Canada, intégraient tous deux le système d'arbitrage international. Le TAFTA a été mis sous le tapis avec l'élection à la présidence des États-Unis, en janvier 2017, de Donald Trump ; ce dernier ne voulait pas du TAFTA, non pas vis-à-vis de l'Europe, mais avant tout parce qu'une conséquence de ce traité était de permettre une délocalisation d'entreprises américaines vers le Mexique où la main-d'œuvre est moins chère.

Quant au CETA, il s'est opposé au veto de la Wallonie, justement parce qu'il incluait le recourt au tribunal d'arbitrage permettant, dans une procédure opaque, à une multinationale d'attaquer un État.

Intéressons-nous à présent au fond des choses. Quand un État nationalise une entreprise, il est clair qu'il s'agit d'une expropriation et il est normal que l'État compense. Mais le cadre des plaintes pouvant être soumises à la cours d'arbitrage va bien au-delà. Par exemple, si un État relève le salaire minimum, passe une loi anti OGM ou interdit les perturbateurs endocriniens, il prive une entreprise de revenus potentiels ; c'est un manque à gagner qu'une logique de profits considérera comme une expropriation indirecte ce qui est un motif recevable par la CPA pour attaquer un État (au sujet d'un investissement qui n'a pas encore eu lieu). [5]

[1] https://www.icj-cij.org/fr/historique

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_international_public

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_international_priv%C3%A9

[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Cour_permanente_d%27arbitrage

[5] https://www.youtube.com/watch?feature=youtu.be&v=00e4dtFGEE4&app=desktop

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