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Économie scientifique
2 mars 2021

067 - L’histoire du travail (de la préhistoire au Moyen-Âge).

Nous avons indiqué dès le premier billet comment le véritable moteur d’un système économique est un flux continu d’énergie consommé au travers de processus de création de richesse-énergie contrôlés par de l’activité humaine.

Nous allons développer dans ce billet et les suivants la notion de travail humain, c’est-à-dire des tâches réalisées par les humains afin de produire des biens et des services.

Nous allons pour cela nous référer au contenu de l’ouvrage « Le travail – Histoire d’une idéologie » par Guillaume Borel, un documentaliste qui s’est tout particulièrement intéressé à l’histoire du travail.

Voici donc pour commencer, dans ce billet, un ensemble d’extraits retraçant les aspects importants de l’histoire du travail depuis la préhistoire jusqu’au Moyen-Âge.

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« Les premières sociétés humaines de chasseurs-cueilleurs du Paléolithique n’entretenaient ainsi qu’un rapport occasionnel au travail, par exemple à travers la fabrication d’outils destinés à la chasse, celui-ci ne constituant qu’une activité parmi d’autres. » [1]

« Avec la sédentarisation et la formation de groupements humains à forte densité de population, la structure sociale s’est profondément transformée. Si les premiers groupes de villageois ont reproduit le système de gouvernement égalitaire des sociétés de chasseurs-cueilleurs, notamment par un gouvernement coutumier assuré par un "conseil des anciens", l’évolution des groupements humains vers la cité a débouché sur la constitution de structures sociales hiérarchisées soumises à un pouvoir autoritaire… La fonction du chasseur chargé de protéger les troupeaux et la communauté des bêtes sauvages va peu à peu se renforcer jusqu’à prendre la tête de la nouvelle organisation sociale.

067-2

L’émergence des cités à la fin du Néolithique allait ainsi consacrer la figure du chef et les attributs du pouvoir qui lui sont liés. Ce pouvoir autoritaire va en premier lieu s’approprier les surplus agricoles et se charger de leur redistribution, ce qui va se traduire par l’érection d’un citadelle puis d’un palais à l’emplacement du grenier où le surplus de la récolte est entreposé. Se posant à la fois comme protecteur et autorité judiciaire, le chef de la cité va enclencher le processus de division du travail à travers différents groupes sociaux spécialisés, et exiger un "tribut" en échange de sa protection, à la manière des chefs de gangs modernes. C’est le début du phénomène de l’exploitation du travail. » [2]

 

« … les mœurs et la mentalité villageoise vont profondément influencer l’organisation de la cité grecque antique, notamment par l’exercice temporaire et par la rotation des fonctions publiques et de l’exercice du pouvoir. Cette forme d’organisation démocratique rend donc superflue la constitution d’une élite dirigeante improductive et des ses volets religieux et militaires, qui absorbaient dans les cités mésopotamiennes une part grandissante des surplus agricoles à mesure de l’accroissement de la cité, aussi bien qu’une spécialisation du travail au service des élites.

067-3

 … au IVe siècle, le nombre d’étrangers résidents, privés du droit de posséder des terres comme de participer à la polis et réduits au statut d’esclaves va s’accroître considérablement. On assiste alors à une séparation entre une classe dominante de citoyens de type aristocratique qui consacrait son temps à la gestion des affaires publiques et aux choses de l’esprit, et une classe vouée au travail qui assure la production économique de la cité…

Cependant, l’esclave antique n’apparaît pas écrasé par le travail, comme le note Jacques Ellul. Ce dernier note qu’il disposait en effet de "larges temps de loisir" et que sa charge de travail était légère. Nous sommes encore loin du processus d’exploitation capitaliste intensif des XVIIIe et XIXe siècles. » [3]

« Le système féodal qui se met en place à la suite de la chute de l’empire romain repose ainsi sur une aristocratie improductive et guerrière, sur le modèle des premières cités mésopotamiennes, qui va consommer le faible surplus alimentaire de la production agricole à travers un système de taxes en nature assimilable à un tribut. Là aussi, les rapports inégalitaires vont chercher à trouver une justification et un consentement populaire… par la promesse de sécurité faite par le pouvoir et qui se matérialisera par l’édification d’une forteresse et d’un mur d’enceinte et l’entretien d’une troupe armée…

Le pouvoir religieux, s’il est largement découplé du pouvoir seigneurial, participe à la justification de l’ordre existant. Il ordonne les règles de la vie spirituelle et de la morale paysanne et s’impose sous cet aspect comme le complément spirituel du pouvoir judiciaire et temporel de l’autorité seigneuriale. L’Église exploite en outre de vastes domaines sur lesquels elle emploie de nombreux villageois. Cette complémentarité des deux pouvoirs se cristallise dans la dîme que le seigneur local se charge de collecter au profit de l’Église…

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Pour autant, l’intensité et la charge de travail demeurent faibles et inférieures à celles que connaîtront les ouvriers après la révolution industrielle. On dénombre en moyenne quatre-vingt-dix jours fériés, et donc chômés, en plus du dimanche, qui correspondent à des fêtes religieuses, ce nombre variant selon les corporations. Le nombre de jours travaillés par mois varie ainsi entre dix-sept et vingt-deux. Le temps de travail reste donc inférieur à ce qu’il est aujourd’hui.

Le XIIIe siècle voit cependant un essor important de la production agricole sous l’impulsion de progrès techniques déterminants comme l’adoption de l’assolement triennal qui permet d’intensifier l’exploitation des sols, ou l’utilisation de la herse… Cet essor de la production va générer un surplus agricole notable et s’accompagner d’un essor parallèle des échanges marchands, notamment à travers les foires, mais aussi d’une généralisation et d’une banalisation de l’usage de la monnaie à la suite du développement des transactions commerciales.

[…]

Dans les villes, l’essor des activités financières porté par la monétisation des transactions, sous l’impulsion des intérêts privés des changeurs, des commerçants et des usuriers, va conduire aux XIIIe et XIVe siècles à un basculement du pouvoir politique au profit des détenteurs des capitaux financiers et des grands argentiers du royaume, dont l’exemple le plus emblématique reste l’ascension politique des Médicis en Italie. » [Voir billet 003, « Histoire du système bancaire » ] [4]

[1] « Le travail – Histoire d’une idéologie », Guillaume Borel, 2015 ; Les Éditions Utopia ; p. 12.

[2] Ibid ; pp. 18-19.

[3] Ibid ; pp. 24-25.

[4] Ibid ; pp. 26-29.

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